carter & julian #1

Julian était plutôt content de sa soirée. Sa soeur Coleen l’avait invité à dîner et ils avaient passé la soirée rien que tous les deux. Son prétentieux fiancé n’était pas là, pour le plus grand bonheur du jeune homme. Il avait un peu de mal à comprendre comment sa soeur, sa merveilleuse, humble modeste et si bien élevée petite soeur avait fait pour se retrouver avec un type pareil. Il respectait ses choix bien évidemment, surtout qu’on ne tombait pas amoureux par choix en général, mais il avait vraiment beaucoup de mal à apprécier Sirius. Leurs échanges se limitaient à “bonjour” et “au revoir”. Il avait essayé pourtant. Il avait fait de gros efforts mais rien n’y avait fait. Il n’arrivait tout simplement pas à passer une soirée en sa compagnie. Si Coleen était là, ça passait à la limite. Et si elle insistait pour qu’il vienne alors que son fiancé était là, il venait quand même. Mais sinon, il ne prenait pas la peine de se déplacer jusqu’à Manhattan.
Ce soir, il avait réussi à s’éclipser juste avant que Sirius ne rentre. Il était plutôt tard mais peu importe, il ferait tout pour sa petite soeur. Heureusement, car une longue journée l’attendait le lendemain et il devait quand même rentrer jusqu’à Brooklyn. A cette heure-ci, les wagons étaient relativement vides. Il n’y avait que deux personnes dans celui où il se trouvait en plus de lui : un monsieur plutôt âgé, et une jeune femme. Comme tout usager du métro se respectant, il ne parlait à personne et ne regardait personne. Il était seul au monde. Mais à l’arrêt suivant, ses bonnes résolutions s’envolèrent lorsqu’un autre homme entra dans la rame. Il avait l’air alcoolisé, et son regard s’était tout de suite posé sur la jeune femme à l’autre bout de la rame. Elle était seule et elle n’avait pas l’air rassuré, Julian le vit immédiatement dans son regard. Il attendit un peu de voir ce que l’autre allait faire, mais il se tenait prêt à intervenir si jamais le besoin s’en faisait ressentir. Ce qui ne tarda pas à arriver. En voyant l’autre type de plus en plus insistant et la fille de moins en moins à l’aise, il se leva et rejoignit celle-ci, passant un bras derrière son dos. “Merci de m’avoir gardé une place ma chérie, j’ai bien cru que j’allais devoir attraper le prochain métro.”

Carter avait eu une longue soirée. Elle l’avait passé en compagnie d’un riche et con gentleman New-Yorkais qui était tellement pénible qu’elle comprenait aisément qu’il ait besoin de payer pour avoir des filles qui lui tiennent compagnie. C’était triste quand même, il aurait pu avoir tout pour lui s’il avait fait un tant soit peu d’efforts pour se montrer agréable. Il n’était même pas si laid en plus. Enfin bref, elle n’avait qu’une hâte à présent, celle de rentrer chez elle. Ses chaussures à talons lui faisaient mal aux pieds et elle était morte de fatigue.

Une chance pour elle, elle n’avait pas eu à attendre trop longtemps avant de récupérer son premier métro, elle espérait juste que sa chance dure car la route jusqu’au Bronx pouvait être très longue à cette heure-là le soir, surtout quand la rame était fréquentée par des gens bizarres. Jusque là, elle était assez tranquille, il n’y avait que deux autres personnes dans le wagon mais à l’arrêt suivant un homme du genre gros lourd ayant un peu trop bu. Et comme il fallait s’y attendre, son attention se porta directement sur elle, les hommes étaient parfois très prévisibles. Elle le regarda un peu désabusé et pas forcément rassurée non plus. Elle n’était pas en sucre mais elle n’avait pas envie de supporter un gros lourd maintenant. Pourtant, il était à présent devant elle et lui parlait de manière à peine compréhensible, cependant ses intentions étaient très claires et Carter savait qu’elle aurait toutes les peines du monde à se débarrasser de lui. Elle regrettait de ne pas avoir pris son spray avec elle mais il ne logeait pas dans son mini sac à main. Avant qu’elle n’ait pu trouver la solution miracle à son problème, quelqu’un se matérialisa à côté d’elle et passa un bras derrière son dos, en la remerciant de lui avoir gardé un siège. C’était un des deux autres passagers qui étaient déjà dans la rame avant l’arrivée du gros lourd. Cette intervention joua le rôle de miracle parce que l’autre se désinterressa d’elle. “C’était efficace au moins. Merci chéri.” fit-elle remarquer en insistant bien sur le dernier mot. “Il va falloir continuer de feindre jusqu’à ce qu’il redescende maintenant.” Parce qu’il l’observait toujours de son coin du wagon.

Julian se considérait comme un véritable chevalier des temps modernes. Ce n’était pas spécialement le cas dans la vie de tous les jours mais il aimait penser qu’il était quelqu’un de bon et généreux, et il était toujours prêt à aider son prochain. Chevalier des temps modernes était peut-être légèrement exagéré, mais il était plutôt fier de lui d’avoir volé au secours de la jeune femme dans le métro. Certes, il ne lui était rien arrivé mais il avait préféré prendre les devants et ne pas risquer qu’il lui arrive réellement quelque chose. Son action eut un effet immédiat : l’autre type laissa tomber tout de suite et alla s’installer un peu plus loin dans la rame. Et même s’il s’était montré un peu trop familier avec la jeune femme, celle-ci n’avait pas eu l’air de lui en vouloir. C’était un réel soulagement pour lui, parce qu’elle aurait pu penser qu’il ne valait pas mieux que l’autre pauvre type, et son envie d’aider aurait été réduite à néant. Mais du moment qu’elle se sentait en sécurité, c’était tout ce qui comptait pour lui. Mais bon, tout semblait bien aller à présent, sauf qu’elle n’avait pas tort sur un point : l’autre les observait toujours et ils allaient devoir continuer à faire semblant au moins jusqu’à ce qu’il ne sorte d’ici, en espérant qu’il sorte avant eux. Sinon, l’un des deux allait devoir louper son arrêt. “Si c’est le prix à payer pour qu’il vous laisse tranquille, je pense que ça vaut le coup.” Mieux valait prévenir que guérir. “Je suis désolé de vous avoir prise au dépourvu comme ça, mais il ne m’inspirait vraiment pas confiance. Je sais très bien que ça ne se fait pas mais j’ai pensé être un moindre mal. Je m’appelle Julian, enchanté de faire votre connaissance."